lundi, novembre 07, 2005

Euthanasier le vieux monde

C'est la saison qui nous oblige à reprendre quelques vieux ouvrages qui traitaient des choses vues et entendues jusque dans les salles de cours, à l'époque où l'enseignement de l'Histoire était une chose encore suivie par des enfants attentifs n'en croyant pas leurs yeux tellement les promesses étaient belles d'un monde réenchanté duquel toute forme de barbarie serait exclue.
Et puis les enfants ont vieilli. Les certitudes se sont transformées en inquiétudes, puis en angoisses diverses. Et l'Histoire a exécuté ses hoquets malheureux et nous avons compris qu'il n'en serait rien. Alors à l'instar de Richard Huelsenbeck, dadaïste de la première heure, nous réclamons la mise à mort des anciennes valeurs qui ont propulsé sur le devant de la scène les icônes flétries du monde de la finance et de la politique qui se tortillent dans une danse du ventre d'une insupportable obscénité, piétinant les cadavres encore tièdes des enfants du tiers-monde inféodés à un destin supérieur.
Huelsenbeck écrivait ceci en 1920 : " La guerre nous avait projettés par-dessus les frontières de nos patries... nous étions tous d'accord : la guerre avait été fomentée par les différents gouvernements pour les raisons les plus platement matérialistes ; nous, les Allemands, nous connaissions "J'accuse" sans quoi il eût été bien difficile de nous convaincre que le Kaiser et ses généraux aient pu être qualifiés d'hommes honnêtes. Ball était réfractaire et moi-même j'avais pu échapper de justesse aux poursuites de ces valets de bourreaux qui, pour des raisons soit-disant politiques, entassent les hommes dans les tranchées du nord de la France et leur donnent des grenades à bouffer. Aucun de nous n'avait ce genre de courage, qui consiste à se faire fusiller pour une nation qui, dans le meilleur des cas, n'est qu'un consortium de trafiquants de fourrures et de peaux, et dans le pire, une association de psychopathes s'en allant, comme dans la "patrie" allemande, avec un livre de Goethe dans leur havresac, pour embrocher à la baïonnette Français et Russes."