Sous le soleil d'Hiroshima

Et si Hiroshima le 6 août 1945 à 8h15 du matin restituait mieux que n'importe quel autre événement mondial l'acme de la violence du monde matériel envers l'humain ? Quel événement pouvait à sa place mieux se présenter comme l'indépassable de la barbarie ? Quelques intellectuels français exilés à New-York prenait le pouls de l'acte impensable et se résignaient à ne plus penser le progrès comme une notion positive. Ils étaient membres du surréalisme ou du dadaïsme, Breton était là, mais à ses côtés un jeune Charles Duits perdait ses dernières illusions face au monde dit "moderne". La seule modernité que ce monde pouvait léguer à leurs enfants était une technologie toujours plus avancée pour exterminer et anéantir l'homme. A son retour en France, Duits ira, comme beaucoup, mais bien avant les beatniks des années 60 ou 70, chercher dans les philosophies orientales, le boudhisme zen notamment, une porte de sortie à cette impasse spirituelle dans laquelle se vautrait l'Occident.
"Hiroshima est partout", disait le philosophe allemand Günther Anders, mari de Hannah Arendt. Nous avons atteint un point extrème dans notre incapacité à accepter le "décalage" entre les productions technologiques et ce que nous en attendons comme améliorations de la vie quotidienne, et notre capacité à utiliser ces techniques à des fins de destructions.
La justification éthique du "moindre mal", c'est-à-dire des vies prétendument sauvées grâce à ce lâchage sur deux villes japonaises, une seule ne suffisait pas pour les "essais" américains, à l'heure de l'entrée à l'école de millions d'enfants innocents, est, comme le souligne justement le philosophe français Jean-Pierre Dupuy, le comble de l'infamie. La justification politique qui a accompagné une telle prise de décision a plongé pour toujours l'Occident dans le remords et la culpabilité. D'autres décisions du même ordre ont aujourd'hui plongé le Moyen-Orient dans le chaos, sur les lieux mêmes où la civilisation sumérienne naissait, dans des temps anciens que trop peu de nous cherchent à connaître. Une langue efface ainsi l'autre de par son efficacité dévastatrice. Triste vérité de l'Histoire sur le champ dévasté par les dérives scientistes et matérialistes d'un monde qui n'a pas eu le temps de dire l'ensemble de ses promesses.
(En passant sur le titre de cet article vous activez un lien qui vous emmène sur le site du photographe japonais Yosuke Yamahata qui était sur le champ de ruine d'Hiroshima le 10 août 1945).


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