lundi, décembre 08, 2008

This is Religion (II)


Bonne lecture sur laquelle je souhaitais publier un post, transversale comme je les aime, d’un livre de l’artiste plasticien Dan Graham autour du rock et de la religion. Dans son « Rock music : textes », recueil de notes variées au gré de l'humeur sur Patti Smith ou l’école de Francfort, les sectes fondatrices de l’Amérique profonde et superstitieuse et l’esprit des pionniers. Pour ce qui concerne ces sectes, arrivées sur le contient avec les premiers pionniers, Graham nous rappelle nombre de ces groupes religieux, vivant pour certains dans des espaces totalement autarciques, sans contact donc avec la société américaine sensée les avoir intégrés, constituent une sorte de socle spirituel inattaquable par la majorité des pouvoirs locaux. Il évoque ainsi les Shakers et les Puritains, groupe historiques auxquels nous pouvons ajouter les Mormonts, que Baudrillard évoque lui dans « Amérique » comme étant l’essence-même de la paranoïa américaine, dévoués qu’ils sont à enregistrer sur ordinateur la généalogie de l’humanité, blanche il va sans dire (on se demande si c’est pour soulager les disques durs ou parce que leur vision de l’humanité se restreint d’elle-même à un corps social « civilisé » exempt de résidus d’un monde sauvage par essence « impur »).
Ces groupes religieux élaboraient des théories selon lesquelles l’homme était né mauvais et devait se racheter dans le travail. Lors de leur arrivée en « terre promise », ces pionniers, pour beaucoup parias dans leurs pays d’origines, arraivaient donc avec la certitude de pouvoir créer une société utopique, un monde dont le péché originel, le Mal absolu, serait chassé à tout jamais. C’est aussi cette « utopie réalisée » qui se serait affranchie du monde primitif, donc du désir, de l’angoisse de la mort, que Baudrillard relèvera dans son opus de 1984 (belle date de publication, n’est-ce pas !). Ces groupes religieux mirent alors toute leur énergie à « nettoyer » la terre des mécréants, qu’ils soient blancs ou rouges de peau.
L’Amérique se forgeait alors dans l’idée d’accomplir une « mission spirituelle ». Toute ressemblance avec un état religieux créé de toutes pièces au Moyen-Orient en 1948 avec la bénédiction... britannique n’est évidemment pas fortuite.
PS : Le lien internet auquel vous pouvez accéder en cliquant sur le titre de cet article vous dirigera sur une page rédigée par un historien realtant la secte des French Prophets, Camisards cévenols arrivés en Angleterre au début du XVIIIe siècle, et qui formerons une partie de l'ossature de ce groupe religieux qui deviendra les Shakers de l'autre côté de l'Atlantique (Parfois les liens Blogger sont capricieux. L'adresse du site en question est : www.camisards.net).

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vendredi, décembre 05, 2008

Métaphysique de l'ailleurs


"Henry Corbin a ouvert au regard de l'Occident l'existence d'un monde jusqu'alors complètement inconnu : la profonde spiritualité des grands mystiques shiites et la philosophie développée dans l'Orient du monde musulman, en particulier en Iran, après la mort d'Averroès. Son œuvre, centrée dans la connaissance et la spiritualité islamique, mais développée dans le contexte des trois religions monothéistes, comprend un nombre considérable d'études sur les rites, ainsi que des traductions et éditions de textes anciens inédits, arabes et persans, qu'il récupéra lui-même patiemment dans les bibliothèques de Turquie et d'Iran." (Présentation extraite du site des Amis de Henry et Stella Corbin).
La place des mystiques dans la pensée est essentielle pour comprendre les différentes formes de trancendance de l'être. Les poésies de Jean de la Croix sont là pour en témoigner. Les écrits de Rûmi, poète mystique de l'islam également.
Un court extrait de la pensée d'Henri Corbin :
« Le thème que nous nous proposons pour ces journée d'études s'enchaîne étroitement à notre thème de l'aimée dernière. Prenant les mots "Orient" et "Occident" non point en leur sens géographique ou ethnique, mais au sens spirituel et métaphysique que leur donne la tradition, nous avions mis en contraste les "pèlerins de l'Orient et les vagabonds de l'Occident". Il s'agit maintenant de savoir comment tenter le pèlerinage vers l'Orient et nous arracher au vagabondage. Avant tout, il faut découvrir la voie. Avec quels yeux faut-il regarder pour découvrir cette voie et s'y engager. »
La voie vers l'Orient est une des voies possible pour se désengager du matérialisme occidental destructeur à l'oeuvre dans le capitalisme qui rabaisse les sociétés à la plus élémentaires des barbaries.

Le capitalisme total


Je me suis toujours demandé de quelle naïveté étaient faits les gens qui croyaient que le capitalisme avait un objectif humaniste, créant un système de dépendance à l'économie sans précédent dans l'histoire des sociétés humaines, refusant les critiques et les diverses alertes lancées depuis le début de la pensée économique par les plus brillants esprits de la planète. La réponse tient en partie dans sa terrible propension à s'autojustifier sans cesse, même sur ses propres ruines comme il le fait en 2008 au meilleur de la crise qu'il a engendrée.
Je propose aux sceptiques la lecture de l'extrait ci-dessous :
"Le capitalisme moderne est organisé comme une gigantesque société anonyme. A la base, trois cents millions d'actionnaires contrôlent la quasi- totalité de la capitalisation boursière mondiale. Souvent d'âge mûr, de formation supérieure, avec un niveau de revenus relativement élevé, ils confient la moitié de leurs avoirs financiers à quelques dizaines de milliers de gestionnaires pour compte de tiers dont le seul but est d'enrichir leurs mandants. Les techniques pour y parvenir s'appuient sur les règles du "gouvernement d'entreprise" et conduisent à des exigences de rentabilité excessives. Elles transforment les chefs d'entreprise en serviteurs zélés, voire en esclaves dorés des actionnaires, et polluent de pure cupidité la légitime volonté d'entreprendre. Ainsi le capitalisme n'est pas seulement le modèle unique d'organisation de la vie économique mondiale: il est devenu "total" au sens où il règne sans partage ni contre-pouvoir sur le monde et ses richesses."
Jean Peyrelevade, "Le capitalisme total" - Seuil 2005.

PS : La photographie qui accompagne ce post est un portrait des brillants investisseurs Lehman Brothers, émigrés Allemands qui développèrent une activité de placements et de conseil aux Etats-Unis d'abord au XIXe siècle en spéculant sur le coton. C'est-à-dire sur le travail des esclaves noirs dans les champs de cette culture qui était source d'importants revenus à l'époque.

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